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Crotte du morning
11 octobre 2015

#21 Le Big Jump épisode 2 : l'arrêt définitif du cannabis, la méditation

La note précédente parle de ma recherche de spiritualité, un besoin d'ancrer mon esprit morcellé dans une pratique spirituelle qui lui permettrait de se réunifier. Je pense que ce que je cherchais, c'était simplement la méditation. Ma tante, bouddhiste elle aussi, m'avait offert un livre, il y a cinq ans de cela, pour apprendre à méditer (indépendemment de toute pratique bouddhique). Je l'ai perdu, elle me l'a offert une seconde fois (son exemplaire personnel), mais je n'avais jamais étudié le sujet. Finalement, ce moment est arrivé. Je ne vais pas m'étendre sur ce qu'est la méditation (il existe assez d'ouvrage et de sites sur le sujet) mais expliquer pourquoi il s'agit d'une solution de choix pour moi et ce que cela me fait réaliser sur mon usage du cannabis.

Si un lecteur éventuel a lu le début de ces "pensées écrites", il ne sera pas étonné de savoir que j'ai rechuté côté cannabis. Cependant, cela s'est passé différement : j'ai pris le plaisir habituel durant 2 ou 3H, et puis, j'ai finalement regretté de retrouver mon esprit confus, et le lendemain, je me suis complètement abstenu. Deux jours après, j'ai décidé, finalement, de me débarasser de ma récolte et de tous mes ustensiles liés à l'herbe et sa culture, ce qui est une chose totalement inédite dans toute l'histoire de ma consommation et de mes arrêts. Pour la première fois, je décide d'arrêter définitivement le cannabis. Auparavant, je parlais toujours de faire une pause, mais il m'était impossible de rayer complètement cet aspect de ma personnalité ... Aujourd'hui, ce faisant, c'est un vrai deuil que je vais devoir affronter. Mais je pense que ma décision est bien ferme, et de toute façon, en me débarrassant des objets, j'aurais des difficultés matérielles à replonger, ce qui me poussera à y réfléchir à deux fois.

Qu'est ce qui a changé ? 

Et bien, même avant la méditation elle-même - que je pratique depuis trop peu de temps pour en sentir les bénéfices profonds - la découverte du concept de méditation m'a donné de précieuses informations sur le fonctionnement de mon cerveau. 

En juin dernier, en voyage, je me suis abstenu de fumer pendant un mois. En revenant, j'ai naturellement fumé, et j'ai senti pleinement l'effet du cannabis sur mon cerveau : l'euphorie, certes, mais surtout, j'ai eu l'impression que mon cerveau s'éparpillait. Et je me suis dit : quel dommage ! Pendant ces vacances, j'ai retrouvé une force de concentration assez utile et voilà que je la répands en mille morceaux.

La méditation a pour objet de développer la concentration, c'est à dire l'effet parfaitement inverse du cannabis. C'est une méthode spirituelle qui nous pousse l'esprit à être unifié et clair. Le cannabis éparpille et brouille. En expérimentant la méditation, j'ai tout de suite réalisé cela.

Maintenant, il est temps d'ouvrir les yeux. Cela fait vingt ans que je fume. Pourquoi ? 

- Le cannabis est euphorisant, donc attractif. 
- J'ai fait une longue dépression d'une quinzaine d'années. L'état de confusion m'allait mieux que l'était de clarté qui était dominé par une souffrance présente et réelle.
- Mon esprit s'est habitué à cet état de confusion euphorique. Je me suis construit comme ça, notamment, créativement. Beaucoup de mes oeuvres me rappellent cet état.
- C'est une drogue, donc addictive pour l'esprit, qui va éprouver des douleurs et difficultés à changer cette habitude - ce qui rend très facile les rechutes.
- Compagnon de toutes ces années noires, le cannabis est devenu une réelle passion pour moi : j'ai investi de mon temps et mon argent pour obtenir du cannabis de la meilleure qualité qui soit, comprenant sa production et ses modes de consommation. Dur de jeter à la poubelle tant d'investissement, pensé-je encore en regardant mon nouveau vaporiseur quasi neuf, très bel appareil.

Mais il est temps d'arrêter pour de bon.

- Le cannabis me rend confus, et inefficace. J'ai besoin de récupérer toutes mes facultés mentales. 
- Toutes ces années à consommer ont énormément fragmenté mon esprit. Aujourd'hui, je pense qu'il est la principale raison des crises d'angoisses qui m'arrivent encore.
- Le cannabis est peut-être sans danger et agréable, utilisé avec grande modération. Mais ce n'est pas mon parcours. 20 ans de consommation laisse des traces, et comme un ancien alcoolique ne peut plus boire un verre, je ne vais peut-être malheureusement plus être capable de fumer sans réveiller les fissures que l'herbe a déjà provoqué dans mon esprit.
- La créativité liée au cannabis est un mythe que je dois debunk. La seule chose que fait le cannabis, créativement parlant, c'est de jeopardizer les idées, et d'ajouter une bonne couche d'euphorie là dessus. Résultat, les sensations sont exagérées, et souvent exagérément plaisantes, ce qui est motivant, stimulant; de plus, la confusion brouille les complexes et autres barrières de la créativité, ce qui nous aide à se lancer plus volontiers dans des entreprises plus hasardeuses, lorsqu'on est sujet à ce type de complexes. Finalement ma dite créativité sous cannabis était une propension à m'extasier sur tout, le bon comme le merdique, à ne pas hésiter à y aller et à produire massivement. Dans le tas, il y avait des bonnes choses, evidemment. Mais l'expérience était déjà faite pour ma part : je composais mieux à l'état clair, mais je jouissais plus du résultat sous cannabis. C'était la meilleure combinaison pour créer quelque chose et en profiter ensuite. 

Comment je vais y arriver ? 

- J'ai un objectif, et un guide, une méthode, dont la méditation fera partie. Ainsi que le sport, et peut-être une thérapie si cela s'avère de nouveau nécéssaire.
- Je n'ai pas la garantie absolue que mon esprit n'a pas été irrémédiablement endommagé, mais si j'en crois la littérature, les médecins, ce n'est probablement pas le cas. Cependant on ne répare pas 20 ans de conso, de fragmentation spirituelle quotidienne, en 2 semaines de méditation .... 
- Un des résultats immédiat de l'abstinence est une peine à jouir. Comme je le dis précédemment, le cannabis euphorise et donc, avec les années, l'esprit a pris l'habitude de jouir grâce au cannabis, et peine à le faire sans. Cette habitude peut prendre des mois à être reprogrammée, voire des années si j'en crois la littérature. Mais avec de la patience, je pense pouvoir y arriver.
- Je n'ai également plus vraiment le choix : c'est une nécéssite. Je ne peux plus supporter ces crises d'angoisse intempestives et handicapantes, surtout que je vais devoir être responsable. M'imaginer être incapable de rester dans la salle d'accouchement avec ma femme à cause de ça est déjà une idée difficile à supporter.
- Les anxiolitiques sont une béquille mais ils me posent un gros problème ! D'abord, parce qu'ils ne m'aident pas à clarifier mon esprit, ils sont aussi confusants, même si leur effet est sédatif au lieu d'être excitants comme le cannabis. 
- Je me débarasse de tout ce qui a attrait au cannabis de près ou de loin : matériel de culture, pipes, vapos, herbe ...
- En faisant le deuil de mon "ancien moi". Ce journal sert aussi à cela. Je songe depuis longtemps à raconter mon histoire, mon combat avec l'addiction. Je suis content d'entamer le dernier chapitre. Je n'ai pas peur d'aller enterrer celui que j'ai été - que j'ai aimé être, aussi, je l'admets - mais qu'aujourd'hui je ne veux plus dans ma vie. Alors, ça a quelque chose de triste. Je vais faire une petite croix en bois, me recueillir, je ne vais pas forcémment l'oublier, mais il sera là : sous terre.
- Et m'accrocher à la construction de mon "nouveau moi" : celui a l'esprit clair, celui tranquille, celui qui découvre de nouveaux plaisirs, de nouvelles pratiques, et la méditation sera la première "passion" de cette nouvelle personne. Cette personne qui n'est pas l'ancienne, l'ado, le dépressif, cette nouvelle personne sera en quelque sorte l'Adulte.

 

 

Le debunk

Un petit paragraphe pour terminer cette note, à propos des mythes dont se persuadent les consommateurs, et que je me permets de dénoncer, en tant que personne ayant consommé 20 ans et n'ayant jamais cessé d'analyser sa conso.

- Le cannabis EST dangeureux. J'ai commencé jeune, à une époque où j'en avais "besoin". Besoin, comme je l'ai dit, pour braver l'interdit, créer ma propre individualité en opposition à mes parents (surtout mon père qui voulait trop me contrôler), mais surtout apaiser mes souffrances dans une période d'impasse, à l'adolescence difficile, en conflit avec mes parents et le monde en général. Cependant cela est resté une habitude qui a endommagé mon cerveau au fil des années, m'a rendu anxieux.
- Le cannabis est puissamment anxiogène. Avec son effet "éparpillant", un esprit sans ancrage va finir avec un trouble anxieux généralisé, trouble panique, bouffées délirantes, voire schyzophrénie pour les personnes à risque ...
- Un petit joint de temps en temps ne fait pas de mal, tant que votre esprit a d'autres ancrages. Vous fumez tous les jours ? Il est quasiment certain que vous en demandez encore car vous fuyez quelque chose. Pendant ce temps, votre esprit se morcelle doucement. J'ai tenu 20 ans en fumant quotidiennement car je me persuadais d'avoir les choses importantes : un emploi, une passion, une copine ... Mais à la première crise passagère, il s'éparpillait dans tous les sens, et je me retrouvais impotent.

Avec le recul, aurais-je pu éviter de m'enfoncer là dedans ? Dur à dire. Evidemment que mes parents étaient contre, m'interdisaient formellement de fumer, mais il n'avaient aucun moyen d'appliquer cette interdiction, et mon conflit avec eux renforçait ma dépendance au cannabis. 

Ensuite, j'ai menti toutes ces années : à ma grand mère qui me soigne, aux psys, à moi même ... Quand j'en parlais à mes amis, à mes conjointes, elle ne voyaient pas vraiment le problème : cela ressemblait à un péché mignon. Je gérais plutôt bien ma conso, je n'étais que très rarement "visiblement défoncé"; elles se disaient que ça n'affectait pas vraiment notre vie, je ne perdais pas d'argent vu qu'indépendant des fournisseurs, cela me donnait la main verte, et ça valait toujours mieux que de trop boire ou d'être violent ! 

Je suis conscient du vrai malaise avec ma conso depuis environ 7 ans ... J'ai mis 7 ans à réussir à trouver une accroche assez solide pour m'en sortir. Et encore, c'est plutôt la vie qui me l'a imposée : l'amour, la paternité, les responsabilités ..

Je n'arrête pas de fumer pour mes enfants, j'arrête de fumer pour moi même, car je veux être une personne sur laquelle on puisse compter. A commencer par moi-même ! De plus, la prise de conscience étant faite, je ne peux plus simplement apprécier le fait de sentir mon esprit se morceller - aussi grande que soit l'euphorie qui l'accompagne, surtout que je peux trouver cette euphorie de façon plus saine.

 

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