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Crotte du morning
10 septembre 2014

#3 le meurtre (raté) de mon père

Peu avant l'internat, vers 15 ou 16 ans, j'étais tellement torturé et en guerre avec mon père, que j'ai voulu me procurer une arme à feu pour me défendre contre lui (encouragé par Kurt Cobain et la fascination des armes à feu que son suicide avait créé chez les ados en mal-être de mon espèce). Je voulais un fusil à pompe comme dans les jeux vidéos, et je m'imaginais tirer des cartouches contre les arbres dans la forêt. Je voulais me sentir puissant, invincible. J'ai aussi imaginé avoir une grenade et la lancer sur sa voiture quand elle rentrait dans l'allée. J'étais fou de rage, il m'envahissait.

Un filou au bahut m'a dit pouvoir me procurer un pistolet pour une somme de 800 francs (120 euros environ). Ce n'était pas un fusil à pompe mais c'était peut-être plus réaliste, après tout.

Mes grands-parents maternels m'avaient donné un peu d'argent sur un compte bloqué à la poste, et pour le récupérer, j'ai fait croire à ma mère que j'avais une dette de drogue, alors que je n'avais encore jamais touché ni même imaginé prendre de la drogue. Ma mère, en bonne pâte, a tout cru à mon histoire, et le lendemain elle m'a donné l'argent dans enveloppe, avec une lettre adressée au dealer, en me disant "donne lui ça au moins, c'est pas bien ce qu'il fait". J'ai sans doute hésité entre rire et pleurer. 

Au bahut, j'ai donné l'argent au filou du bahut, et il m'a dit qu'il verrait ce week-end.

Le lundi, il est revenu et il m'a dit qu'il était désolé mais qu'il n'avait pas pu obtenir l'arme, mais qu'il avait ponctionné mon argent de 200 francs pour rembourser le trajet en train que cela lui avait nécéssité pour essayer. Il va sans dire qu'il est plus que probable qu'il m'ait simplement enculé et qu'il n'ai jamais eu de plan ou l'intention de me fournir une arme. Et sur le coup, j'ai été plutôt rassuré : pas d'arme, pas de danger, et en plus, j'étais quand même riche de 600 francs.

J'ai acheté des CD de Radiohead et les baskets trop cool d'un pote.

Plus tard, lors d'une dispute violente à la maison, j'ai crié à mon père que j'avais essayé d'acheter une arme pour le tuer. Il a crisé et je me rapelle de lui se tapant le crâne (qu'il avait déjà chauve) sur la porte, tout rouge, en gémissant "mon fils veut me tuer". Ma mère, la pauvre, était là aussi.

Ce n'est que beaucoup plus tard, adulte, que j'ai avoué à ma mère que cette histoire était fausse. Elle n'a pas trop su quoi dire, moi j'en rigolais.

Je ne crois pas l'avoir raconté à mon père.

Plus tard, vers 17 ou 18 ans, je cacherais une barre de fer sous mon lit - au cas où ça tournerait mal avec lui. Pourtant mon père n'a jamais levé le petit doigt sur moi. Je savais qu'il m'aimait. Il n'était pas chaotique ou égoïste. Je savais qu'il agissait comme ça pour "mon bien". Mais il ne laissait aucun interstice quand il entrait dans la pièce. Il était psychologiquement écrasant. Il avait une grosse voix et un air dur, déterminé. Parfois seule la violence me paraissait encore une issue. Heureusement, je ne me suis jamais servi de cette barre. 

 

 

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